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Les Echos Société

Et si on montait un écolieu ?

Vivre dans un environnement bienveillant, au plus près de la nature, ç​a vous tente ? L’expérience d’Anouk qui, avec cinq autres personnes, s’est lancée dans le vivre ensemble grâce à l’écovillage du Bel Air en Bretagne.

Je savais que je ne voulais pas vivre comme mes parents, au sein de ma seule cellule familiale », lance Anouck Dupin, vingt-cinq ans, originaire de Tours. Alors, quand un couple rencontré par les réseaux sociaux lui propose, en 2018, de monter un écovillage , elle dit tout de suite banco. « Notre objectif était de vivre dans un lieu ouvert sur le monde, autosuffisant et intergénérationnel , en symbiose à la fois avec la nature et avec les autres », confie la jeune femme, titulaire d’une licence professionnelle en coordination de projets d’animation et de développement social et socioculturel.

Comme elle, de plus en plus de Français décident de se réunir pour habiter et parfois travailler ensemble en partageant des valeurs écologiques et humaines communes. « A l’échelle de la France, le mouvement reste encore assez petit, mais il ne cesse de prendre de l’ampleur », assure Mathieu Labonne, PDG de la coopérative Oasis qui accompagne la création d’écolieux en France.

Aujourd’hui, on recense environ 1.000 écolieux sur tout le territoire. « Beaucoup de ces ‘oasis’ ont vu le jour à la suite de la crise du Covid avec l’envie de plus de calme, de verdure et d’autonomie », analyse-t-il.

Trouver un collectif

Avoir envie est une chose. La concrétiser en est une autre. « L’enjeu le plus important et le plus complexe, c’est de trouver un collectif », affirme Mathieu Labonne. « ç​a peut être des gens qu’on connaît déjà et en qui on a confiance, comme des amis, des membres d’une association, ou bien des inconnus qui partagent les mêmes valeurs. » Anouk, elle, a choisi de s’unir à cinq autres personnes, dont son copain de l’époque, et un très bon ami.

Après plusieurs mois de recherches, ils visitent ensemble un terrain d’une quinzaine d’hectares de prairies et de forêts au bord du lac du Bel Air, à Priziac (Morbihan), sur lequel s’élèvent les ruines d’un château datant du XIe siècle. C’est le coup de foudre. David et Lynn, le couple à l’initiative du projet, signent le compromis avec une clause de substitution, le temps de créer la société civile immobilière (SCI) qui deviendra, à terme, propriétaire du terrain.

Reste à trouver le financement. « Il nous fallait 300.000 euros pour l’achat du domaine et 100.000 euros pour les travaux », détaille Anouck. « Aucune banque n’ayant accepté de nous suivre, nous nous sommes tournés vers un proche qui a accepté de nous prêter la somme pour deux ans. » Avec le soutien de la coopérative Oasis, les six cohabitants lancent ensuite une campagne de prêts participatifs qui leur permet de réunir 240.000 euros.

« Pour nous aider à rembourser ces emprunts, nous organisons, sur place, des formations, des journées découverte et différentes activités à destination du grand public », explique Anouk. Mais cela ne suffit pas. « Chaque mois, chacun met une somme libre et consciente qui sert à payer le loyer, les charges, la nourriture, l’essence, l’assurance de la voiture… » Pour promouvoir le vivre-ensemble, toutes les installations sur le site sont mutualisées : potager, cuisine, voitures, machine à laver. Toutes, sauf les logements.

Communication non-violente

« On n’est pas une coloc’ mais un village », rappelle Anouk. Cela signifie que chacun a son propre habitat léger – dôme, yourte, caravane, mobile-home – et mène sa vie comme il l’entend. « On a choisi de mettre très peu de règles et de s’appuyer sur la responsabilité individuelle des résidents », explique Anouk.

Pour favoriser les bonnes relations, l’écovillage du Bel Air cultive le plus possible la communication. « On organise une réunion logistique une fois par mois pour définir qui fait quoi et une réunion dite émotionnelle une fois par mois aussi pour permettre à chacun de dire aux autres où il en est. »